Les arts textile filent vers le succès
Ces cheffes de fil suivent les traces de leur aînée l’artiste Sheila Hicks. Grâce à elles, la broderie n’est plus seulement reconnue comme un artisanat, mais est élevée au rang d’art, présenté par galeries, foires et festivals d’art contemporain. Les arts textiles connaissent donc un nouvel âge d’or. Tour d’horizon sélectif de ces nouvelles « fées crochet ».
Crédits photo : APR - maison parisienne - Aurélie Mathigot - Au pied de la colline sacrée, 2020 © maison parisienne - 1
1/ Audrey Demarre
Cartographier le sensible, comme elle dit. Mais aussi raccommoder des pièces du passé, imaginer des mondes nouveaux, les transmettre comme le faisaient avant elle les couturières de sa famille. Et maintenant tirer un fil à l’infini sur la grande Toile du numérique. Sur Instagram, avec près de 100 000 abonnés, Audrey Demarre met ses doigts de fée, et son talent, au service d’autres femmes, ses sœurs de fils, toutes artistes textile. La brodeuse autodidacte, ancienne éditrice de beaux livres, a réuni une cinquantaine de ces créatrices dans un magnifique ouvrage paru cet été. Avec une infinie poésie, une invitation à explorer ces univers libres. Tout comme l’inspirent les destins de femmes comme Frida Kahlo, Lee Miller, Georgia O’Keefe… Audrey Demarre travaille à la demande sur des cartes blanches.
-Son dernier projet ? Le bel ouvrage « Broderies, anthologie curieuse » aux Éditions Lamartinière.
-Ses prochains projets ? Une grande tête de lit brodée sur le thème « lichens et mousses » pour des particuliers et une commande de pièces uniques pour un grand magasin japonais (combinaisons et vestes de travail chinées et brodées avec des trompe l’œil : broches, médailles, badges). Et la suite ? Deux nouvelles collaborations avec la marque la Prestic Ouiston et une autre avec la marque de mode Jane Gustavsson.
-Voir ses œuvres ? instagram.com/audreydemarre/
2/ Camille Mugnier
Si vous la cherchez, vous la trouverez sur un chemin de transhumance en Espagne, à suivre un troupeau de brebis ou à papoter avec un papy tondeur de moutons. Après avoir réalisé une série de tissage à partir de papier et de teinture végétale, Camille Mugnier œuvre à tisser des liens entre pratiques ancestrales et art contemporain, en tout cas le sien, de sublimes pièces grands formats aussi légères à la vue que puissantes au toucher. Rien d’étonnant à ce que la jeune femme soit passée par la Corderie Royale de Rochefort pour s’inspirer des techniques de nouages des mateloteurs ou encore imaginer des reflets entre ses œuvres et les lentilles de phares. Proche de la terre et du vivant, elle a aussi longuement résidé à la Ferme de Brouage, en Charente Maritime, paradis du maraichage et lieu d’agroécologie étonnamment inspirant.
-Son dernier projet ? Une résidence « Laine et création » à la Casa de Velazquez à Madrid, en partenariat avec le Mobilier National et l’ADGP à Paris, puis une exposition à partir du 13 novembre à cette même Casa.
-Son prochain projet ? Poursuivre sa série « Présence dans l’absence », à partir d’une technique de peinture à l’aiguille.
-Voir ses œuvres ? À l’île de Ré ou à Minorque à la Galerie Thierry Bertrand
-Et plus : instagram.com/camille.mugnier/ et millo-millo.com
3/ Aurélie Mathigot
La photographie fige un moment de réalité que la brodeuse va venir transformer à sa guise. Aurélie Mathigot tisse ainsi un fil entre les deux médiums, la photo et le textile. D’une beauté délicate, ses œuvres apportent de l’épaisseur à l’instant t du cliché. Et c’est d’ailleurs grâce cette dimension du temps que chacune de ses œuvres gagne en matière. Broder, perler, crocheter à la machine ou à la main, dans une palette de couleurs, en fil de coton, de lin, de soie. Rien n’est immédiat dans le lien, semble nous dire son travail. Des objets du quotidien viennent parfois s’ajouter à ses compositions. Façon de démontrer que la somme des parties devient, entre ses mains, plus grande que le tout.
-Son dernier projet ? Une œuvre surdimensionnée intitulée « Hommage à Calais » présentée en avril dernier dans l’exposition « 15 ans, 15 artistes, 15 œuvres » à la galerie Maison Parisienne.
-Voir ses œuvres ? Au show-room de la Maison parisienne. La galerie les exposera aussi à Bruxelles en janvier, à Pad Paris en avril et Révélations en mai.
-Et plus : instagram.com/mathigotaurelietextualab/
4/ Lily Alcaraz et Léa Berlier
Lily et Léa se rencontrent sur les bancs de Duperré en section design textile. Toutes deux ont, par leur famille, la passion du fil. La suite de leur parcours commun se trame à l’ENSCI, où le binôme apprend à croiser le textile avec d’autres matières, le papier, le cuir, le bois... Les tissages de Lily Alcaraz et de Berlier composent des paysages abstraits à suspendre ou à couvrir le sol, des assises, des murs, ou encore prendre vie sur des accessoires de mode. La démarche créative de ce sacré duo s’inscrit dans une réflexion sur la matière, le motif et la couleur. Leurs pièces uniques prennent forme sur leurs métiers à tisser de leur atelier parisien.
-Leur dernier projet ? L’exposition "Weaving – Traditions meets innovation" à la galerie Handxerk à Munich où elles présentent des pièces composées de matières comme le bois, le cuir, le feutre, afin d’illustrer aux côtés d’autres artistes les métissages des pratiques ancestrales avec des techniques actuelles. Jusqu’au 16 novembre.
-Leur prochain projet ? En collaboration avec le designer Pierre Charrié et l'ébéniste Jean-Brieuc Chevalier, elles explorent les matières tissées de fils et de bois ainsi que leurs applications dans le domaine de l'objet et du mobilier. Le résultat de ces recherches sera présenté au salon Révélations. Un projet qui a reçu le soutien du CNAP.
-Voir leurs œuvres ? À la prochaine biennale Révélations au Grand Palais (Paris) du 21 au 25 mai 2025. Leur atelier au 50 rue Saint-Blaise dans le 20ème arrondissement de Paris est ouvert aux professionnels uniquement sur rendez-vous.
-Et plus ? instagram.com/lilyalcaraz_leaberlier/ et lilyetlea.fr. Pour suivre un cours en ligne « Expérimentation des couleurs, des motifs et des matériaux », domestika.org
5/ Jeanne Vicérial
Artiste-couturière et chercheuse, Jeanne Vicérial a inventé pendant ses études de mode la méthode du « Tricotissage » partant du constat qu’aujourd’hui c’est aux femmes de devoir rentrer dans les tailles imposées par l’industrie du textile et non l’inverse. Comment redonner sa place au corps ? La créatrice a mis au point cette technique s’inspirant du tissage musculaire humain à l’aide d’une aiguille courbe similaire à celle utilisée en chirurgie. S’en est suivie une thèse de doctorat avec le département de mécatronique de l’École des Mines ParisTech.
-Son dernier projet ? L’exposition « Avant de voir le jour » au Musée du Vieux Nîmes jusqu’au 24 novembre et l’installation « Sans attendre la naissance du jour » au Musée Soulages jusqu’au 3 novembre, à Rodez. Jeanne Vicérial est en résidence à Kyoto à la Villa Kujoyama jusqu’à fin décembre 2024.
-Voir ses œuvres ? Elle est représentée par la galerie Templon.
-Et plus ? jeannevicerial.com et instagram.com/jeanne_vicerial
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