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Les inspirations de Lorraine Campet, De Robert Desnos à Maria Helena Vieira da Silva

Dimitri Scapolan / Instagram @ingesonradio   Après sept années à jouer au sein de l’Orchestre Philharmonique de Radio France la contrebassiste Lorraine Campet a fait son entrée en avril dernier à l’Opéra de Paris comme super soliste. Dans un parcours débuté au plus jeune âge, une nouvelle étape qui devrait mener loin cette jeune musicienne de classique aussi talentueuse que discrète. Entre deux répétitions, Lorraine Campet a posé ses partitions pour nous confier ses coups de cœur. Elle a fait…

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@Dimitri Scapolan / Instagram @ingesonradio

Dimitri Scapolan / Instagram @ingesonradio

 

Après sept années à jouer au sein de l’Orchestre Philharmonique de Radio France la contrebassiste Lorraine Campet a fait son entrée en avril dernier à l’Opéra de Paris comme super soliste. Dans un parcours débuté au plus jeune âge, une nouvelle étape qui devrait mener loin cette jeune musicienne de classique aussi talentueuse que discrète. Entre deux répétitions, Lorraine Campet a posé ses partitions pour nous confier ses coups de cœur.

Elle a fait ses débuts il y a quelques mois comme super soliste à l’Opéra de Paris. On pourrait penser à l’aboutissement d’une carrière. Pour Lorraine Campet, à tout juste 27 ans, c’est la suite d’un rêve débuté très jeune. Celle que l’on présente comme l’une des contrebasses les plus talentueuses de sa génération a découvert son instrument fétiche à l’âge de quatre ans et demi, encouragée par des parents musiciens. « Ce fut un coup de foudre qui m’a ouvert tout un univers », explique-t-elle en racontant ses premiers pas d’enfant surdouée suivie par un premier professeur qui lui met le pied à l’étrier. Des années formatrices. « J’ai appris à ses côtés qu’un bon contrebassiste tient le rôle de socle et de support des autres instruments de l’orchestre. Il doit d’abord écouter les autres ». L’entrée au Conservatoire, des premiers prix de concours prestigieux, puis la rencontre décisive avec Thierry Barbé, contrebasse solo à l’Orchestre National de l’Opéra de Paris, et enfin sa passion pour un deuxième instrument, le violon. Lorraine Campet se fait connaître jusqu’à être appelé à 17 ans à passer et réussir le concours d’entrée à l’Orchestre Philharmonique de Radio France. « J’étais le bébé de l’orchestre » s’amuse-t-elle à dire aujourd’hui. Elle y restera sept ans avant de s’envoler vers d’autres succès : l’Opéra de Paris, des projets de musique de chambre au violon, mais aussi des projets personnels qui équilibre sa vie à l’étonnante maturité. En juin on a pu l’écouter aux Étoiles du Classique, le nouveau festival, à Saint-Germain-en-Laye, consacré à la jeune génération. Rendez-vous maintenant en novembre au Palais Garnier pour son premier opéra. Un bon alignement des astres puisqu’elle y jouera la Flûte Enchantée de Mozart, lui qui dès l’âge de six ans écrivait ses propres compositions.

 

Mitridate de Mozart

« Mitridate, Re di Ponto » est le premier opéra « seria » de Mozart. Ma version de prédilection est celle du ténor américain Bruce Ford, interprétée en 1991 au Royal Opera House de Londres. Ce chanteur mozartien peu connu du grand public, à la carrière trop brève, nous livre une interprétation époustouflante du rôle-titre. C’était un chanteur sublime qui avait une grande classe. J’ai entendu cette version pour la première fois il y a quelques années. Un ami fan d’opéra me l’avait envoyée. Par la suite, je me suis procuré la version complète en DVD. C’est la quintessence de ce qu’une voix peut donner : la perfection technique au service de l’émotion. L’écouter me fait du bien. La voix de Bruce Ford est douce comme du miel, inspirante, touchante. Et en même temps, on retrouve la sobriété et la simplicité que la musique de Mozart requiert. Une version parfaite. »

 

« Corps et Biens » de Robert Desnos

« J’ai découvert ce recueil de poésies lorsque j’étais lycéenne. Ce fut pour moi un bouleversement. Depuis il ne m’a plus quittée. Je relis ces poèmes très fréquemment. Dans le climat politique actuel, il résonne en nous sous de nombreux aspects. Je possède une édition de poche de « Corps et Biens » que j’emporte souvent avec moi lorsque je voyage. La lecture de ce recueil m’a conduite aux autres œuvres de Robert Desnos, grande figure du mouvement surréaliste. Déporté et mort au camp de concentration de Theresienstadt, Robert Desnos a beaucoup écrit durant la seconde guerre mondiale sur la liberté et aussi sur le fait qu’il fallait se battre pour la défendre alors qu’il était opposé à la guerre. S’il y a une bataille à mener, c’est celle pour la liberté. Dans « Corps et Biens » on trouve aussi ce poème sublime « J’ai tant rêvé de toi » issu du recueil « À la mystérieuse » évoquant un amour non partagé. Les autres grands textes du Surréalisme peuvent me toucher, mais c’est particulièrement cette voix-là que j’aime. »

Yardani Torres Maiani et son album « Asteria »

« C’est la rencontre de la musique gitane flamenco avec la musique classique savante. Absolument génial. Yardani est violoniste, il a composé toutes les pièces de l’album dans lequel il rassemble deux violons, une guitare électrique, un clavecin, un violoncelle et une contrebasse. Cette musique me touche directement au cœur. Elle est pleine de vie et d’histoires. Yardani Torres Maiani a su mélanger sa musique de cœur, gitane-flamenco, avec tout ce qu’il a appris dans son parcours classique au conservatoire. C’est le croisement de ces deux mondes-là. J’ai eu la chance de partager un concert avec lui, nous avons joué le programme de son album et il m’a écrit et dédié une pièce pour contrebasse solo. C’est une très belle rencontre, qui s’est faite grâce à un ami commun qui savait que l’on s’entendrait bien ! Sa musique c’est l’Andalousie et c’est tellement imagé que l’on se trouve, dès les premières notes de l’album, transporté . On imagine les chevaux, la poussière, la chaleur, le feu qui crépite… On part loin, et aussi loin de l’univers très conservateur du classique. Découvrir ces modes de jeux avec lui m’ont offert une distance par rapport au cadre. Le cadre est bien pour apprendre. Une fois qu’on a appris les bases, il faut s’en détacher. »

Les Variations Goldberg de Jean Rondeau

« Ça a été un déclic quand je les ai entendues pour la première fois. Puisqu’on parlait de liberté, cet album est la parfaite expression de la liberté dans un cadre. On connaît par cœur les variations Goldberg de Bach. C’est presque mythique. Jean Rondeau est un jeune claveciniste. Il arrive à incarner les Variations d’une manière que je n’avais jamais entendue avant. Il a un rapport au son extrêmement riche, coloré, de toutes les couleurs et puissances possibles. Pour moi, il réussit une explosion de sons, de liberté, de groove. Il a une personnalité forte, intelligente, mais aussi humble, généreuse et sincère. L’identité d’un musicien transparaît toujours dans son jeu. J’ai rencontré l’humain avant connaître le musicien. J’avais envie de l’écouter jouer, de me rendre compte de sa liberté et de sa force de personnalité. Tout naturellement, j’ai dû taper son nom dans YouTube et je suis tombée sur sa version des Goldberg. »

André Comte-Sponville

« Un philosophe qui m’inspire beaucoup et m’accompagne dans mes réflexions au quotidien. J’aime beaucoup sa façon très simple de guider la pensée et de rendre ainsi la philosophie accessible. Elle nous incite à l’humilité. Je retiens de sa pensée l’idée de vivre pleinement sa vie plutôt que de la rêver. Il nous convie à vivre davantage le moment présent, à agir et aimer, à avoir moins d’expectatives et donc moins de déceptions ou de frustrations. Carpe Diem ! »

Maria Helena Vieira da Silva

« J’ai découvert l’œuvre de cette artiste portugaise au langage unique dans une rétrospective au musée Cantini en 2022 à Marseille. C’était une magnifique exposition qui retraçait ses périodes clefs. Le fait que la perspective soit son principal sujet de recherche la rend extrêmement sensible et poétique. Et quoi de plus inspirant que de mettre de la poésie dans la perspective ? J’ai eu la chance de visiter ses ateliers grâce à Emmanuel Jaeger car sa famille était très proche d’elle. (Son père, Jean-François Jaeger était un grand galieriste, propriétaire de la galerie Jeanne Bucher, et a énormément soutenu cette artiste exceptionnelle). C’était très émouvant de découvrir l’espace où elle a puisé son inspiration et où elle a tant créé ! »

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