Il occupe une place de choix sur le podium des mobiliers iconiques. Elément de décoration vintage singulier, ce fauteuil ou canapé sans pieds ni accoudoirs et à la forme fripée reconnaissable entre mille est une icône du design, emblème de l’époque des seventies. S’il était formellement et techniquement novateur à sa conception en 1973, aujourd’hui il plaît toujours autant pour son confort inégalé. Asseyez-vous, détendez-vous, la French Touch vous raconte l’histoire de l’Iconique Togo Ligne Roset.

A l’origine du design du Togo : Michel Ducaroy, porte-étendard d’une nouvelle ère de designers défricheurs

A la fin de la seconde guerre mondiale, la reconstruction de l’Europe appuyée par le plan Marshall permet à la France, comme à d’autres pays européens, de connaître une croissance économique qui atteint parfois plus de 5% par an. Les Trente Glorieuses commencent, le pouvoir d’achat s’envole… la société de consommation est en route. C’est à cette période que le confort dans l’habitat devient la norme, appuyé par l’essor de la publicité, grandement facilité par l’utilisation de nouvelles matières, et favorisé par l’émergence d’une nouvelle génération de designers à l’imagination fertile et en quête de renouveau.
Michel Ducaroy en fait partie : c’est lui qui créé le canapé Togo. Il naît en 1925 à Lyon, dans une famille d’industriels créateurs de meubles contemporains, l’usine Chaleyssin. Il étudie à l’Ecole supérieure nationale des Beaux-Arts de Lyon, section sculpture, puis rejoint l’entreprise familiale. En 1960, il prend la tête du département design d’une autre entreprise familiale : la maison Roset, basée à Briord, dans l’Ain, spécialisée dans la fabrication de chaises, et qui deviendra plus tard Ligne Roset. Il y restera 26 ans, aux côtés du patron Jean Roset et du directeur commercial Jean-Claude Flageollet, et proposera des pièces jeunes, innovantes, originales, de nombreux modèles de sièges et canapés qui témoignent déjà d’une nouvelle ère dans le domaine du design, en phase avec les nouveaux matériaux utilisés dans le secteur tels que la mousse, la ouate, les matières synthétiques ou encore le plastique thermoformé.

Le Togo, le best-seller de la maison Roset

En 1973, la maison Roset présente le Togo de Michel Ducaroy au salon des Arts Ménagers, un rendez-vous annuel présentant les innovations en matière d’habitation et d’équipement. Ce canapé-coussin à trois places, entièrement en mousse, sans armature, dont l’assise novatrice se confond avec le dossier, surprend le public comme les professionnels. Il reçoit un accueil mitigé, suscitant tantôt l’incompréhension, tantôt l’engouement. Son aspect fripé aussi, détonne. Le Togo, unique en son genre, semble comme recroquevillé. Michel Ducaroy lui-même a dit s’être inspiré « d’un tube de dentifrice plié comme un tuyau de poêle et fermé aux deux bouts ». Et c’est bien ce design surprenant au premier regard qui confère à ce mobilier son immense confort, en plus de son rembourrage généreux : des mousses de trois densités différentes, enveloppées dans une housse elle-même garnie de ouate de polyester. Notre Togo est repéré par quelques personnalités avant-gardistes, dont les membres du jury du très prestigieux prix René-Gabriel, qui récompense tous les ans, jusqu’à la fin des années 70, un créateur de mobilier moderne et innovant dans une gamme qualitative et économique pour en démocratiser l’usage. Le Togo s’ancre pleinement dans son temps et est adopté, notamment par la jeunesse qui le trouve très à son goût pour son aspect allure décontractée, en rupture avec les attentes et les codes de la bourgeoisie qui paraissent démodés. Plus qu’un canapé, la jeune génération en fait même un emblème Pop Art, et le propulse au rang d’icône du design, utilisé volontiers par les artistes. La dessinatrice Claire Brétécher mettra en scène ces Frustrés, personnages de bande dessinée humoristique publiée dans l’hebdomadaire Le Nouvel Obs (Le Nouvel Observateur), dans des Togo.
Une popularité authentique, un succès commercial indéniable, qui amènent de fil en aiguille la maison Roset à l’international. Notre iconique Togo, vendu à plus d’un million d’exemplaires, est aujourd’hui commercialisé dans 72 pays et se décline dans une large palette de tissus, cuirs, couleurs, motifs, et formats (canapé, fauteuil, modèle d’angle, pouf). Ligne Roset est, quant à elle, toujours une affaire de famille, actuellement dirigée par Antoine Roset et Olivier Roset, la 5ème génération à la tête de l’entreprise qui défend un savoir-faire exceptionnel et s’engage dans le plus strict respect du processus de production : 6 heures de travail très physique sont nécessaires à la fabrication d’un Togo.

Restauration du canapé Togo : Ligne Roset mise sur la seconde main

Depuis 2021, Ligne Roset s’est lancée dans la revalorisation de son iconique Togo, y accordant même un atelier dédié dans son usine de production à Chambord. Chaque canapé récupéré est tout d’abord diagnostiqué afin d’en évaluer la vétusté et de séparer les éléments à recycler de ceux pouvant être retapissés. Puis, le re-tapissage se fait avec un tissu neuf en fibres PET recyclé (obtenu en recyclant des bouteilles en plastique). Enfin, chaque produit reconditionné est remis sur le marché. Une démarche qui s’inscrit dans une stratégie d’économie circulaire et répond à des enjeux d’écologie et de durabilité, écrivant un peu plus encore l’histoire de l’iconique canapé Togo, en accord avec son temps.

Pour aller plus loin

Intéressé(e) par l’histoire du Togo Ligne Roset ? Découvrez Sofa, à la poursuite du Togo, une enquête pour comprendre ce succès planétaire. Un podcast écrit par Aurélie Sfez, réalisé par Charles de Cillia et produit par Radio K7 France.