Trudon, l’histoire d’un cirier français ancré dans son époque
Plus ancien cirier en activité au monde, Trudon a su conserver au fil des siècles son savoir-faire d’excellence tout en ne cessant de se renouveler. Cette Entreprise du Patrimoine Vivant a récemment mis fin à l'utilisation de cire d'abeille au profit d’une cire végétale. Un engagement fort qui s’inscrit dans une démarche de préservation de la biodiversité.
Tout commence en 1643, à l’aube du règne de Louis XIV. Dans l’une des rues qui deviendra, bien des années plus tard, l’épicentre du raffinement français, le marchand Claude Trudon, devient propriétaire d’une boutique dans laquelle il développe une activité d’épicier et de cirier. Au début du XVIIIe siècle, l'enseigne, qui jusque-là portait le nom de son propriétaire et dont les produits s’adressaient aux paroisses et aux ménages aisés, devient la Manufacture royale des cires. A sa tête, Jérôme Trudon, héritier de la maison, innove et parfait la fabrication de bougies en cire d’abeille, qui deviennent d’un blanc immaculé. Un savoir-faire qui se hissera jusqu’à la cour impériale de Napoléon 1er.
Au fil des siècles, les produits ne cessent d’évoluer pour s’adapter aux besoins. En 1989, elle est reprise par la famille Blondeau qui s’essaie à la création de différentes gammes de bougies parfumées, destinées à un marché national et décoratif. Mais c’est dans les années 2000 que l’entreprise repousse les limites de son savoir-faire pour s’essayer au parfum en lançant en 2017 cinq fragrances signature et des parfums d’intérieur. Elle ambitionne ainsi de « devenir un acteur qui compte dans le paysage de la parfumerie », note l'actuel directeur de création de l'entreprise.
Faire rimer savoir-faire artisanal et réduction de l'impact environnemental
« Nous développons toujours de nouveaux produits (et de nouvelles catégories) visant à rendre hommage à notre histoire et notre savoir-faire exceptionnels », souligne Julien Pruvost. Et c’est justement ce goût pour l’artisanat et l’Histoire de France qui a encouragé la maison Trudon a réinventé les bustes et cierges en "camée" représentant des symboles ou visages historiques, en partenariat avec la Réunion des Musées Nationaux (RMN). Une collaboration prestigieuse qui est loin d’être la seule puisque l’entreprise a également imaginée des bougies pour les maisons de coutures telles que Giambatista Valli, Valentino ou Balmain.
Aujourd’hui labélisée Entreprise du Patrimoine Vivant, le cirier continue d’ériger des ponts entre son savoir-faire et les préoccupations de son temps. Avec l’objectif de réduire son impact environnemental, Trudon offre désormais une seconde vie à ses flacons vides et verres à bougies. Collectés en exclusivité dans l’un des quatre points de vente parisiens, ils y sont recyclés et échangés. Contre chaque verre à bougie, une réduction de 10% sur tout achat immédiat d’une nouvelle bougie du même format est offerte. En 2018, l'entreprise remet en question le modèle qui a fait la renommée de ses bougies. Elle met fin à l'utilisation de cire d'abeille au profit d’une cire végétale, européenne et principalement biologique. Un engagement fort qui s’accompagne d’un soutien financier en vue de protéger l’abeille noire endémique européenne, aujourd’hui grandement menacée par l’agriculture intensive et l’apiculture industrielle. Un partenariat riche de sens lorsqu’on sait que depuis 1643, la devise de la Maison est : “Deo regique laborant” qui signifie “elles (les abeilles) travaillent pour Dieu et le Roi”.